Jean-Baptiste Wicar

LE PLUS GENEREUX DONATEUR DU MUSEE DES BEAUX-ARTS DE LILLE

(voir aussi ),

Par Vera Dupuis

Personnage prodigieux dont la vie à elle-seule est un roman : né le 22 janvier 1762, 84 Rue Royale à Lille, d’un pauvre ébéniste, il deviendra un peintre célèbre, couvert d’honneurs lors de son long séjour en Italie : Chevalier de l’ordre des Deux-Siciles, Conseiller de l’Académie Romaine de Saint Luc, Directeur de l’Académie Royale de Naples, et même membre correspondant de la Société des Sciences, de l’Agriculture et des Arts de Lille à partir de 1809, renouvelé en 1833 – voir ci-dessous.1*

Trop pour un seul homme ? L’histoire rocambolesque de Jean-Baptiste commence le jour de ses 10 ans : son père est appelé au château du Comte César Hespel de Guermanez, à Haubourdin, dans la banlieue lilloise, pour effectuer des travaux de menuiserie, Jean-Baptiste l’accompagne. Tandis que son père prend des mesures, le garçon s’avance à travers les salons, attiré par les tableaux. Tellement attiré qu’une heure plus tard, lorsque le Comte traverse la galerie en compagnie du père, ils trouvent Jean-Baptiste reproduisant au sol une grande toile. Stupéfaction : c’est la copie conforme de celle accrochée au mur. Le comte n’écoutant que son bon cœur, lui offre une bourse pour s’inscrire en 1772 à l’école de dessins de Lille dans le cours du peintre Louis-Jean Guéret. A partir de 1774 le jeune Wicar expose ses dessins au Salon de l’Académie des Arts de Lille et à presque tous les Salons jusqu’en 1779, année où il quitte Lille pour Paris, toujours avec l’aide de son bienfaiteur le comte Hespel qui lui octroie, avec l’aide de la ville de Lille, une pension de 300 livres tournois pour ses débuts dans la capitale. Dès son arrivée, Wicar s’intègre dans le cercle des artistes du Nord qui l’accueille généreusement en l’aidant dans les moments pécuniairement difficiles. Il y a là les frères Masquelier, le sculpteur Roland, et le wallon P.J. Sauvage, ils le présentent au peintre David. Excellent élève, le jeune lillois, admis dans l’atelier du plus illustre peintre de son époque, « le » David (Jacques-Louis), se lie d’amitié avec Girodet, Gros, Gérard, Guerin et Drouais, peintres ayant déjà acquis une certaine célébrité. David le prend en amitié et l’emmène à Rome où il souhaite lui-même trouver l’inspiration pour son tableau « le Serment des Horaces » – commande de Louis XVI. Nous sommes alors en 1784, Wicar a 22 ans : il est jeune, observe, et découvre avec émerveillement les grands peintres de la Renaissance dans les collections du Vatican et les galeries des Palais florentins. Enthousiaste, il entreprend de dessiner, pour la gravure, la galerie entière de Florence, tache immense. Son ardeur à l’étude est telle, qu’après une année de travail incessant il rentre à Rome avec 400 dessins, les copies de 300 camées, 90 bustes et 50 portraits. Il va confier la gravure et la publication aux frères Masquelier de passage à Florence, mais avant tout compatriotes lillois, complices de ses années d’apprentissage parisiennes. Le succès des publications est immense, elles constituent le fondement de la fortune de Wicar. Il va consacrer des longues années à dessiner l’ensemble des collections artistiques à Florence tout en partageant sa vie entre Naples, Rome, Gènes et Paris, il fait un dernier voyage à Lille en 17872*. Pour autant il n’a pas oublié sa ville natale, pour preuve cette anecdote rapportée par le sculpteur Théophile Bra (auteur du monument de la Déesse, dressé au centre de la Grand’Place de Lille, inaugurée en 1845). « Wicar en 1793 était à Florence ; mais il était resté Français et Lillois. Il entendit du fond de sa douce retraite le sifflement des bombes autrichiennes qui écrasaient le toit du pauvre (siège de Lille par les autrichiens en 1792), son coeur saigna au récit des souffrances de ses compatriotes, et le jeune artiste, qui n’était encore alors riche que d’espérances, préleva sur son chétif budget une somme assez forte qu’il s’empressa d’envoyer au comité des secours pour les veuves et les orphelins de Lille ». Ce fut le peintre David qui déposa l’offrande de Wicar à la Convention en s’exprimant en ces termes :  » Je suis chargé, Citoyens, de faire hommage à la patrie pour le soulagement des veuves et des orphelins de Lille, d’une somme de 600 livres au nom du citoyen Wicar, artiste lillois du plus grand mérite; résidant à Florence depuis sept années. », ceci se passant à la séance de la Convention du 6 mars 1793 – 3 mois environ  avant la grande Terreur3*

Wicar est de retour en France en 1794. A force de copier, d’apprendre et de s’intéresser aux œuvres des grands maîtres, il est devenu un fin connaisseur à tel point qu’il devient, sur recommandation de J-L David, membre du Conservatoire, section des antiquités. « Depuis le 27 Nivôse de l’an deux, le Conservatoire remplace la commission des musées au nom du comité de l’instruction publique. Wicar loge désormais au Louvre où il a la charge de rassembler et d’inventorier dans les musées nationaux les monuments propres à l’étudier de l’art », il touche 2400 livres par an4*. Il jouit d’une érudition considérable et d’une parfaite connaissance de plusieurs langues à tel point que Bonaparte, retour d’Italie, le nomme membre de la Commission pour la recherche des objets des sciences et des arts en Italie. En clair : il est chargé de choisir – lire « piller » – les pièces dignes d’être transportées à Paris.

J-B. Wicar séjourne jusqu’à sa mort en Italie. Il continue à peindre, à exposer en France, en Angleterre, ses biographes parlent même d’un voyage en Amérique en 1817 pour y exposer son tableau « La Résurrection du fils de la veuve de Naïm » (aujourd’hui au Palais des Beaux Arts de Lille). Il profite de son passage à Paris pour peindre le portrait de Sébastien Bottin en 1816, (S. Bottin membre de la SSAAL dès 1804, Président en 1806-07 et à nouveau de 1810 à 1815).

Mais surtout Wicar rentre dans l’histoire car il devient l’un des plus célèbres collectionneurs d’art de son temps : tableaux, sculptures, dessins et objets, rien ne lui échappe. Il a un véritable don pour choisir les chefs-d’œuvre de la Renaissance. Il montera en tout trois collections, on lui vole la première, la deuxième est aussitôt vendue en 1823 au grand marchand de Londres Samuel Woodburn pour 11.000 écus romains ; tenace, il en monte une troisième. C’est cette troisième, fabuleuse, collection qu’il lègue à sa mort en 1834 à la Société Royale des Sciences, de l’Agriculture et des Arts de Lille. Le catalogue Wicar compte selon les époques et diverses publications entre 1035 et 1437 numéros, dont les nombreux dessins de Raphaël (ici 13 des 16 publiées par Oskar Fischel, Berlin 1913), de Michel-Ange, de Poussin, du Titien, de Parmesan, de Botticelli, sans oublier le magnifique bas-relief de Donatello. Cette inestimable collection de dessins de la Renaissance est exposée à partir de 1850 dans le nouveau musée Wicar, qui a ouvert ses portes au public en 1850, au deuxième étage de l’Hôtel de Ville en y ajoutant toutes les collections de peintures, d’histoire naturelle, numismatique, céramique… L’éminent architecte Charles Benvignat, membre de la SSAAL, est promu directeur du musée Wicar. Il est particulièrement fier de l’existence des voûtes anti-feu pour protéger cette précieuse collection. Le Directeur des Musées de France, Ph.-A. Jeanron laisse libre cours à son enthousiasme dans son rapport de 1853 adressé au Ministre des Beaux Arts, Achille Fould « ... pour vous exprimer mon impression, Monsieur le Ministre, devant la plupart de ces sommités, j’épuiserais toutes les formules laudatives, sans arriver à dépeindre des choses dont le mérite frappe les yeux si puissamment. Il y a dans les grandes collections des capitales de l’Europe des pensées premières des maîtres de l’art aussi belles et aussi précieuses; mais les beaux morceaux qui se trouvent à Lille ne leur cèdent en rien… ». Incontestable vedette de ce temps-là : « la Tête de cire » du legs Wicar, magnifique buste de jeune fille (attribué à tort à Raphaël, Alexandre Dumas fils en possédait une copie dans son cabinet), suivie du  roman touristique lillois « On a volé la tête de cire » de Léopold Delannoy, Ed. René Degresse, Paris, qui sera dans toutes les librairies les années 1830. Plus tard, la SSAAL transfèrera ce legs inestimable à la ville (1865, incluant l’ensemble des Musées gérés par elle ; en échange la ville s’engage à lui verser annuellement la somme de 6.000 francs).

Se pose la question : pourquoi Jean Baptiste Wicar a-t-il fait en 1834 ce legs à la SSAAL ? Les liens avec sa ville natale, Lille, sont inexistants depuis la mort de ses parents et de son unique sœur Catherine, sa nomination en 1809 en tant que membre de la SSAAL est tombée aux oubliettes à force de silence et d’absence d’échanges entre la Société et le Chevalier et un beau jour, il a disparu de la liste des membres correspondants ! Il a donc fallu un événement fort pour raviver les liens et les souvenirs entre Rome et Lille. Celui-ci s’est produit en 1832 : Wicar reçoit dans son atelier à Rome (toujours via Vicolo del Vantaggio mais l’atelier vient d’être modernisé en 1825 par l’architecte Giuseppe Valadier) la visite de quelques lillois, dont Edouard Liénard, peintre, membre de la SSAAL et fils du graveur Jean-Baptiste Liénard, professeur parisien du jeune Wicar. De retour à Lille, Edouard décrit sa rencontre avec le Chevalier et insiste sur le renom dont jouit le peintre à Rome. La SSAAL se souvient alors de son ancien correspondant et le 4 janvier 1833, MM. Maquart, Verly et Dourlen redéposent sa candidature, acceptée le 15 février après la lecture d’un rapport d’Edouard Liénard sous forme de notice. Voilà notre Wicar ré-intégré sur la liste de la SSAAL et on décide – élément fort pour la suite – de lui envoyer à Rome la collection complète des Mémoires de la SSAAL. (cf. J.C. Dufay, Notice sur la vie de Wicar, 18445*). Cette fois-ci Wicar reçoit sa nomination avec « l’enthousiasme le plus patriotique » ainsi qu’il l’écrit dans sa lettre de remerciements du 20 mai 1833. Un an plus tard, le 20 janvier 1834 il rédige son testament, et charge son légataire universel M. Dominiconi, de donner à la SSAAL sa collection de dessins originaux, plusieurs objets antiques de bronze et de marbre, quelques autographes et une tête en cire de l’époque de Raphaël. Sans oublier surtout « l’œuvre pie » Wicar (le Prix) dont l’évolution est retracée ici  par Alain Gérard), ET il lègue à la ville de Lille son grand tableau « La résurrection du fils de la veuve de Naïm ». Jean-Baptiste Wicar meurt le 27 février 1834 « d’hydropisie de poitrine ». L’artiste avait fixé le lieu de sa sépulture en l’église de Saint-Louis-des-Français à Rome, la stèle du sculpteur Guacchecini y perpétue son souvenir.

En 1870, le legs du Chevalier Wicar trouve un rebondissement lors du voyage à Rome d’Aimé Houzé de l’Aulnoit (membre de la SSAAL). En voici le récit relaté dans la séance du 1er Juillet 1870 devant les membres de la SSAAL, (in extenso ici, il apporte un élément fort et nouveau, jamais encore relaté à notre connaissance dans les publications sur la collection Wicar): « Me trouvant à Rome au mois d’avril dernier, pendant les fêtes de la Semaine Sainte, Mgr de Cambrai voulut bien m’informer, dans une visite que j’eus l’honneur de lui faire, qu’un officier supérieur de l’armée pontificale qui avait épousé la nièce de M. Dominiconi, légataire universel du chevalier Wicar, était propriétaire d’un grand nombre de dessins de ce dernier et qu’il serait peut être disposé à réunir ces richesses artistiques à celles que la ville de Lille tenait déjà des libéralités du chevalier Wicar lui-même. Mettant à profit cette bienveillante communication, je m’empressai de voir le commandant Fusignani ; celui-ci m’accueillit avec une grâce parfaite, s’enquit avec le plus vif intérêt de l’état et de la richesse de la collection, des honneurs accordés à la mémoire du chevalier Wicar, et me confirma dans l’espérance que Mgr de Cambrai avait fait naître dans mon esprit. Après plusieurs conférences, je fus assez heureux pour le décider tout-à-fait à offrir à notre cité un souvenir vivant de Wicar, souvenir qui témoigne à la fois de son ardeur au travail, de son talent, de son imagination patiente et consciencieuse. »

Les faits suivirent de près cette promesse ; et la semaine suivante (fin juin 1870) la commission des dessins du Musée de Lille, procédait à l’ouverture de la caisse renfermant ces divers envois. L’inventaire commence et bientôt la commission espère pouvoir adresser [à la SSAAL] un rapport détaillé sur les œuvres nouvelles dont vient de s’enrichir notre Musée.

M. le Commandant Fusignani, par une générosité qui m’a profondément touché, a cru devoir joindre aux dessins de Wicar, un cahier d’études de divers maîtres à mon adresse. Je lui ai témoigné ma reconnaissance de cette bonne pensée mais je n’ai pas cru devoir en profiter. Il m’a semblé que rien de ce qui avait appartenu à Wicar ne devait être distrait de sa riche collection et j’ai prié à mon tour M. le Maire de Lille de bien vouloir accepter l’hommage des dessins qui m’étaient réservés.

La caisse contenait :

Un tableau « Le roi Murat en pied » [actuellement au Musée des Beaux-Arts de Lille] et un Portrait d’une princesse Bonaparte « peints par Wicar ; cinq albums renfermant environ 250 dessins de Wicar ; 40 à 50 autres dessins de Wicar ; Un cahier grand in-folio renfermant 60 dessins environ de divers maîtres ».

Dans l’élan provoqué par ce nouveau don qui vient encore enrichir le legs Wicar 36 ans après la mort du Chevalier, la SSAAL décide de faire faire son buste par Hector Lemaire, ancien pensionnaire à Rome, lauréat du prix Wicar. « M. Lemaire a répondu d’une manière très satisfaisante à notre désir » annonce le président Menche de Loisne dans la séance du 8 janvier 1871 lors de l’attribution des prix au titre de l’année 1870.

Un autre voyageur, parti pour Rome en 1874 n’est autre que notre éminent confrère François Chon6*. Il rend visite au lauréat du prix Wicar, le jeune sculpteur Alphonse-Amédée Cordonnier, installé depuis 1872 et pour quatre ans dans l’atelier Wicar, via Vicolo del Vataggio. Sa description du lieu est précise : « Wicar, pour sa plus grande gloire a enchâssé dans la façade sur la rue, quatre belles plaques de marbre destinées à rappeler à la postérité que des Souverains sont venus, dans son atelier, admirer le tableau de la Résurrection du fils de la veuve de Naïm. » Et Chon d’ajouter un tantinet perfide « Au Musée de Lille, qui possède cette immense « machine » si raide, si prétentieuse et dont les personnages, mal équilibrés, ont l’air de tomber les uns sur les autres, on peut juger à leur juste valeur les suffrages princiers dont le peintre se vante dans les inscriptions qui s’étalent en italien sur les murs de son palais (toute maison qui a une porte cochère est, à Rome, un palazzo). Voici la traduction : François 1er, empereur d’Autriche, accompagné de son épouse Caroline Auguste, de son frère, le prince Joseph, palatin de Hongrie, et d’autres princes a rempli cet atelier de l’éclat de Sa Majesté, le 16 avril 1819, a daigné examiner le tableau inachevé de la Résurrection de la veuve de Naïm et lui accorder des éloges compétents, comblant ainsi de joie l’auteur de ce tableau, Jean-Baptiste Wicar, français de naissance, citoyen romain, qui, afin d’en conserver la mémoire, a fait poser cette inscription ». Ensuite au mois de février 1820, c’est le pape Pie VII qui vient visiter Wicar convalescent, après avoir assisté à une neuvaine faite en faveur du peintre, et qui l’a réconforté par des consolations et des louanges. En 1822, le roi de Prusse, Frédéric-Guillaume III a visité aussi l’atelier de Wicar, a vu le grand tableau (« grandem tabulam ») avec des yeux de connaisseur, l’a admiré et couvert d’éloges. Enfin, au mois de mai 1825, le roi des Deux-Siciles, François 1er, a visité l’atelier Wicar pour admirer la Veuve de Naïm. F. Chon a reçu un accueil chaleureux de notre lauréat, A.A. Cordonnier7*, il le remercie chaleureusement pour « la complaisance qu’il a mise à nous accompagner dans les galeries du Vatican ; nous ne pouvions avoir un guide plus sérieux et plus utile ».

En 1898, un autre jeune sculpteur, Jules Déchin (Lille 1869 – Paris 1947), devenu à 29 ans lauréat du prix Wicar, s’installe pour 4 ans à Rome : point d’orgue de son séjour, une Statue en marbre de Jean-Baptiste Wicar.8*

La SSAAL au grand complet n’a pas manqué de commémorer le centenaire de la mort de J-B. Wicar en janvier 1934 devant sa maison natale, 84 rue Royale9*. Le legs Wicar est aujourd’hui soigneusement classée et répertorié dans les collections du Palais des Beaux Arts de Lille ; les précieux dessins de la Renaissance, fragiles à la lumière, ne sortent qu’à de rares expositions, moments forts auprès du grand public, conscient de l’inestimable trésor légué par Wicar à la SSAAL d’abord, qui en 1865 l’a cédé à la ville de Lille. Lorsque vous passerez au Musée de Lille, arrêtez-vous devant l’autoportrait de J-B. Wicar drapé dans un époustouflant costume de fantaisie (repris au centre du bandeau inaugural de ce site), ayez une pensée pour l’enfant qui, en reconnaissance de la générosité du magistrat Comte Hespel lors de ses années décisives d’apprentissage dans les écoles académiques lilloises ou lors de son séjour à Paris pour se perfectionner auprès de grand maîtres, a offert à sa ville de Lille, sa fabuleuse collection de plus de 1.000 dessins de la Renaissance.

(Voir aussi la conférence de V. Dupuis du 17 juin 2016 « La SSAAL et les Beaux Arts » où le lecteur trouvera beaucoup d’autres détails sur Wicar)

1* Nous devons à Sébastien Bottin (membre titulaire de la SSAAL 1804) la nomination de Jean-Baptiste Wicar en tant que membre correspondant, décembre 1809. Il aura manifestement entendu parler de ce peintre lillois installé au loin, à Rome, par son ami artiste N.F.J. Masquelier, graveur lillois. Dans la Notice Nécrologique sur Masquelier lue par S. Bottin à la Société d’Amateurs des Sciences et Arts de Lille (séance du 11 août 1809), ce dernier laisse entendre la vie parallèle qu’ont mené à la même époque les Frères Masquelier et J.B. Wicar, fréquentant au même moment la même école de dessin à Lille, et se retrouvant ensemble à Paris dans le cercle du peintre J.L. David, et ce sont encore une fois les frères Masquelier qui, sur place, à Florence vont graver et publier les dessins faits par Wicar dans la Galerie florentine. Visiblement S. Bottin, familier des frères Masquelier, les a entendu prononcer le nom de Wicar suivi d’éloges. Toujours en 1809, Bottin, en tant qu’amateur d’art mais surtout en tant que secrétaire général à la Préfecture du Nord prend activement part à l’ouverture du premier musée de Lille, le 15 août 1809, dans l’ancien Couvent des Récollets – raison de plus pour proposer membre correspondant l’artiste J.B. Wicar ; ce qu’on lit dans le Mémoire daté 1811 : Wiquart (sic) peintre à Florence, membre correspondant.

2* cf. Annie de Wambrechies, Catalogue de l’Exposition « Le Chevalier Wicar », Lille Palais des Beaux Arts 1984.

3* Rapport présenté le 26 juillet 1843 par M. Pierre Legrand, Président de la SSAAL, au nom de la Commission chargée d’examiner les mémoires des concurrents à la médaille offerte à l’auteur de la meilleure Notice sur la vie et les ouvrages de J.B. Wicar, peintre lillois, la commission était composée de MM Dourlen, Le Glay, Derode, Chon et Legrand, membres de la SSAAL (Publication, Mémoires SSAAL 1844) .

4* Philippe Auguste Jeanron, Directeur des musées, rapport au Ministre des Beaux Arts, Achille Fould 1853

5* « Notice sur la vie et les ouvrages de Wicar », J-C Dufay 1844. En 1843 la SSAAL annonce dans sa séance solennelle qu’une médaille d’or d’une valeur de 300 francs sera décernée à l’auteur de la meilleure notice sur la vie et les œuvres de J.B. Wicar. L’heureux gagnant, J.C. Dufay, est Secrétaire de l’intendance militaire, membre correspondant de la Société royale d’émulation de l’Ain, son texte sera publié dans le Mémoire de la Société, 1844. L’auteur nous apprend entre mille autres détails dans quelles circonstances cette fabuleuse collection de dessins, de tableaux et d’objets est arrivée à Lille : « Notre ambassadeur à Rome, Monsieur le Marquis Fay de la Tour, profitant de son retour en France en 1835, voulut bien faire charger la plus grande partie de cette précieuse collection, sur le bâtiment de l’Etat, Le Castor, appareillé pour lui, et bientôt la ville de Lille put jouir de la munificence du donateur ». Les caisses contenant les tableaux furent déposées au Muséum d’Histoire Naturelle, les autres dans la tour nord à l’Hôtel de Ville – local humide et mal aéré.

6* Elle mesure 2 m. de haut. Wicar, déjà un peu âgé, en habits d’époqie, est debout, fièrement campé dans une pose décidée, le pouce de la main gauche glissé dans la poche de son panrtalon, la main droite tenant à la fois un crayon et un grand carnet de dessin qui repose sur un pseudo autel funéraire sur lequel sont gravées 3 inscriptions dont celle de la « Société Sciences et Arts ». Jules Déchin informe la SSAAL  en 1901 qu’il expose son « Wicar » au Salon de Paris avant de le faire parvenir à Lille un an plus tard. En 1903, Carlos Batteur, Président de la SSAAL et lui-même Lauréat du Prix Wicar, pensionnaire à Rome, rappelle dans son discours « le voeu que nous avons émis l’an dernier, relativement à la statue du Chevalier Wicar par M. Déchin s’est réalisé. La Ville, avec la participation de l’Etat, en a fait l’acquisition pour notre Musée » ; il ajoutera à la séance solennelle du 27 décembre 1903 : « Parmi ces jeunes artistes, je dois une mention particulière à Déchin qui dans une pensée pieuse et reconnaissante a sculpté cette statue qui est aujourd’hui au Musée de Lille. Ce solide personnage, à la physionomie énergique et réfléchie, bien pris dans son habit cavalier, drapé dans l’ample manteau romain, c’est JB Wicar notre bienfaiteur ! » Cette statue devient un élément décoratif majeur à l’extérieur du Palais des Beaux-Arts, installée dans le jardin fermé par des grilles, jusqu’aux années 1980.

7* Alphonse Amédée Cordonnier est l’auteur du monument Pasteur, inauguré en 1899 place Philippe Lebon à Lille, Marie-Louis Cordonnier est l’auteur du socle. Une maquette préparatoire en terre cuite est exposée au Palais des Beaux Arts de Lille dans la salle des sculptures

8* Fernand Beaucamp membre de la SSAAL a écrit une excellente biographie en deux tomes : « Le Peintre lillois Jean-Baptiste Wicar 1762 – 1834, son œuvre, son temps », Ed. Emile Raoust 1939 (E. Raoust libraire et éditeur Rue Neuve à Lille, membre de la SSAAL).

9*« Un mois en Italie Gènes-Bologne-Florence-Pise-Rome-Naples-Venise-Milan-Turin et le Mont Cenis », par François Chon, Lille, Louis Danel Imprimeur-Editeur 1875 ; signalons que F. Chon est également auteur de Promenades lilloises, 582 pages, 1888

Et ajoutons pour le plaisir que J.W. von Goethe cite Wicar dans son ouvrage « Le siècle de Winckelmann », édité en 1805, où on lit page 343, « Vicar (sic), ein Schüler von David, wurde in dieser Art als der geschickteste Künstler seiner Nation angesehen ». (Zeichnungen kräftiger zu behandeln pflegen). Traduction : Wicar, un élève de David, a été reconnu comme le plus talentueux artiste français de son temps dans le domaine du dessin.

Vera Dupuis