La Société des Amateurs des Sciences et des Arts
devient
La Société des Sciences, de l’Agriculture et des Arts
Le 4 novembre 1819, M. de Muyssart, Préfet du Nord rend l’arrêté suivant :
Vu la circulaire de son Excellence le Ministre de l’Intérieur en date du 14 août 1819, relative à l’institution d’une société d’agriculture dans chaque chef-lieu d’arrondissement ;
Considérant qu’il existe déjà à Lille une Société d’Amateurs des Sciences et Arts, qu’elle s’est déjà occupée d’économie rurale et qu’elle consent à comprendre l’agriculture au nombre de ses travaux ;
Arrêtons ce qui suit : 1° La Société des Sciences et Arts existant à Lille tiendra lieu de la Société d’agriculture de l’arrondissement de Lille ; elle prendra le titre de Société des Sciences, Arts et Agriculture. (cf. Anatole de Norguet « Histoire de la SSAAL de 1802 à 1860 »).
Avec leur sérieux coutumier, les membres de la SSAAL, sous la présidence de J-V. Vaidy forment aussitôt une commission chargée d’accueillir les nouveaux membres issus du monde rural – à l’époque cela ne se faisait pas sans longues discussions internes -, on admet finalement plus de grands propriétaires terriens que de simples cultivateurs. Le sujet de l’agriculture a très intensément occupé notre Société de 1820 à 1856 et en particulier lors de la distribution des prix en faveur de l’économie rurale (à partir de 1856 le Comice Agricole prendra le relai). Lors de la séance solennelle de 1827, le Président J. Macquart insiste sur les « deux branches de notre prospérité rurale que la SSAAL a particulièrement en vue dans l’arrondissement de Lille : celle du houblon et le concours ouvert pour améliorer la race ovine ». Il ajoute « la qualité bien grossière de nos laines avait engagé la Société à exciter l’introduction de béliers étrangers dans l’espérance d’améliorer cette branche ». A la grande déception de tous, une première tentative d’introduire les races anglaises et hollandaises est restée sans résultat. Aussitôt et sans se décourager, la Société lance un nouvel appel aux propriétaires de troupeaux pour le concours de 1828.
L’aide viendra d’un membre correspondant extérieur, qui n’est autre que le vicomte Sosthène Ier de la Rochefoucauld, directeur des Beaux-Arts auprès du roi Charles X, mais manifestement un gentleman-farmer (son portrait ci-dessous, par F-J Heim, au Louvre). Il fait don à la Société
Royale des Sciences, des Arts et de l’Agriculture de Lille d’un superbe bélier anglais du New-Leicester. L’impulsion est donnée et M. Champon-Dubois, propriétaire éclairé, va acquérir d’autres bêtes de la même race (que le bélier).
Et voilà comment les Arts ont volé au secours de l’Agriculture !
Mais l’attribution de l’Agriculture dans notre rôle ne se fait pas sans heurts
Dans sa publication, A. de Norguet se fait l’écho de quelques frictions survenues en 1841 à propos de la subvention versée annuellement par le Conseil Général à la SSAAL pour soutenir son engagement vers le monde rural. Un rapide calcul montre que, depuis 1820 la Société a reçu 4 fois : du Département 2.300 francs et du Gouvernement 3.500 francs, total : 38.000. Mais, fait valoir la Société, elle a décerné pour 47.535 francs de primes, 118 médailles d’or ou d’argent, et une très grande quantité d’instruments d’honneur. Le Conseil Général pose alors une question assez délicate qui vise directement la Société : Faut-il dépenser dans des publications agricoles ? Et le Conseil de se répondre à lui-même : « Non car le cultivateur ne lit pas ». « Si, Il lit ! » lui rétorque la SSAAL « et les livres faits non par des hommes étrangers à la pratique, mais par ceux qui véritablement savent produire, nous semblent devoir être profitables. » La Société s’est trouvée heureuse de pouvoir concourir à fonder des bibliothèques rurales, et elle l’a fait avec empressement. Elle se trouve heureuse de répandre des connaissances dans les campagnes au moyen de ses publications agricoles, parce qu’elles ont produit un bien qu’on ne saurait nier. Elle met ces publications dans les mains de ses associés, qui, assurément, sont bien capables de les comprendre et de les méditer, et qui savent bien ensuite à qui les confier. Ces petits livrets sont comme les jetons de présence qui attestent l’affiliation des agriculteurs à une Société laborieuse et scientifique, c’est dans ces cahiers que sont décrites les nouvelles cultures que nos associés ont entreprises et qu’ils montrent à leurs voisins ; c’est là que sont mentionnées les distinctions et les récompenses qu’ils ont obtenues. « Louer et faire connaître, ce que les praticiens ont tenté, leur donner un moyen de propager les bonnes méthodes, en leur laissant le mérite, nous semble être ce qui attache le plus fortement à la Société les hommes qu’il importe d’inviter à prendre part à nos discussions. Nous pensons donc qu’il n’est pas possible de proscrire les publications agricoles, nous en avons obtenu les plus heureux résultats. »
Juste pour mémoire les prix décernés pour 1828 aux Agriculteurs :
– Trois médailles pour les houblonnières les mieux cultivées : l’une d’une valeur de 200 francs à M. Lecomte-Lepoutre (de Bousbecque), l’autre à M. Descamps (à Croix), et une d’une valeur de 150 francs à M. Leroi (à Houplines),
– Un prix de 150 francs à M. Masquelier propriétaire du plus beau taureau présenté au concours,
– Un prix de 100 francs à M. Hochart (d’Allennes), propriétaire du second plus beau taureau,
– Un prix de 100 francs à M. Masquelier-Boet pour avoir présenté la plus belle génisse hollandaise née dans l’arrondissement,
– Quatre prix de 50 francs chacun à MM Potier-Casetan, Houzé de l’Aulnoit, Masquelier-Boet et Labbé, propriétaires des génisses les plus belles après les précédentes.