La Société des Sciences de 1802 à 1854

Par Alain GERARD

Le titre de « Société des Sciences » que nous avons adopté (et qui, par commodité sera constamment utilisé dans les pages qui suivent) est, en fait, l’abréviation de l’intitulé plus long, qui changera au fil des années, et qui est actuellement « Société des Sciences, de l’Agriculture et des Arts de Lille ».

Nous avons choisi cette dénomination raccourcie, non seulement dans un esprit pratique, mais pour bien marquer que nous voulions uniquement étudier le rôle de cette Compagnie savante dans la préparation du terrain devant conduire à la création de la Faculté des Sciences de Lille. Cette même préoccupation justifie les dates choisies : 1802 date officielle de la création de la Société et 1854, année d’installation de la Faculté des Sciences.

Seules quelques allusions seront faites à la poursuite de l’action de la Société des Sciences (toujours en activité) au-delà de cette date.

La Société des Sciences et l'enseignement scientifique avant 1854

La Société des Sciences joue un rôle important dans l’installation des premières structures pré-universitaires d’enseignement à Lille. Cette position s’explique tant par les origines, et les buts clairement affirmés de ce groupement, que par la présence de quelques personnalités que nous aurons à étudier plus en détail.

Les origines de la Société sont parfaitement connues malgré la disparition de ses archives détruites lors de l’incendie de la mairie de Lille en avril 1916. À la fin du mois de septembre 1802, un groupe de Lillois, amateurs de physique et de chimie, prend l’habitude de se réunir chez l’un d’entre eux, Pierre, Joseph Becquet de Megille (1777-1836), riche propriétaire qui avait constitué un « cabinet de physique » remarquablement outillé. La réunion régulière de ce groupe de « jeunes savants », occupés, tant à manipuler les appareils mis à leur disposition, qu’à présenter des conférences, aboutit à la constitution officielle, le 10 nivôse an XI (31 décembre 1802), de la « Société des Amateurs des Sciences et des Arts » alors composée de dix membres.

Les obligations militaires (capitaine de la Garde nationale mobilisée) puis politiques du premier président lui feront quitter Lille pour Douai un an après. Les membres se réuniront dès lors chez leur collègue Lambert, commissaire des poudres, disposant d’un laboratoire de chimie à la raffinerie de salpêtre. Ils élisent comme second président Étienne Louis Malus (1775-1812), commandant du génie alors en résidence à Lille, mais surtout célèbre physicien, connu par sa découverte de la polarisation de la lumière.

Deux des importantes orientations de la Société des Sciences, la physique et la chimie, sont dès lors affirmées. Le recrutement de nouveaux membres, ajoutera d’autres préoccupations de recherches, et le terme de « Société d’amateurs » cesse de correspondre à la nature des travaux poursuivis par un groupe qui se réunit avec une grande régularité.

Des démarches sont entreprises pour obtenir la qualification de « Société Royale » et l’autorisation est accordée à la condition d’ajouter l’agriculture dans l’intitulé de ce qui devient donc, le 11 septembre 1829, la « Société Royale des Sciences, de l’Agriculture et des Arts ». Les buts de la société demeurent la promotion de travaux et de recherches originales dans divers domaines. Les activités scientifiques, littéraires et artistiques ne sont plus seules concernées ; l’agriculture — nous dirions plutôt l’agronomie — est désormais incluse dans le domaine de ses préoccupations. Ces travaux sont encouragés par trois commissions permanentes (physique, histoire naturelle, agriculture) et un nombre variable de commissions temporaires.

Les travaux de la société font l’objet de publications qui commencent en 1806. Ces volumes de « mémoires » deviennent bisannuels à partir de 1823 et annuels en 1833, date de parution du quinzième tome. Les publications sont très appréciées car elles suppléent au manque de journaux scientifiques. Leur échange avec les parutions des travaux des sociétés françaises et étrangères poursuivant des buts analogues à ceux de la Société des Sciences de Lille est un moyen d’information fort utile.

Une deuxième forme de manifestation publique de l’activité de la société est la distribution de prix (médailles, diplômes, mentions honorables, éventuellement récompenses en espèces) à l’occasion des séances solennelles annuelles. Cette procédure est inaugurée le 4 novembre 1825, à l’occasion de la Saint-Charles, fête du souverain régnant alors....

Une troisième activité intéressant le public non participant aux travaux de la Société des Sciences ne tarde pas à s’ajouter aux précédentes. Ce sont des cours publics qui viennent compléter ceux existant déjà à l’initiative des autorités municipales et créés, sous le nom d’écoles académiques, à la demande de l’architecte Gombert. Ces cours, fondés en 1755, interrompus pendant les années agitées de la Révolution, et rétablis depuis, intéressent essentiellement les arts plastiques et le dessin.

Des cours de botanique leur ont été ajoutés en 1770 grâce à l’action insistante de Jean-Baptiste Lestiboudois. Avec ce personnage hors du commun nous allons aborder la participation de la Société des Sciences à l’organisation de l’enseignement scientifique dans la ville de Lille.

La botanique et la famille LESTIBOUDOIS

En fait ce n’est pas l’action d’un seul personnage que nous devons envisager, mais bien l’activité de trois membres d’une famille.

Le grand-père Jean-Baptiste (1715-1804), né à Douai, y effectue des études médicales qu’il complète par un poste d’apothicaire, d’abord à l’hôpital militaire de sa ville de naissance, puis, à celui de Lille. Ce ne sont ni la médecine, ni la pharmacie qui l’intéressent réellement ; une seule chose le passionne, la botanique à laquelle il dévoue toute sa vie. Sitôt arrivé à Lille il entreprend des démarches insistantes auprès du Magistrat de la ville pour obtenir la réouverture d’un jardin botanique qui avait été supprimé en 1761. Il obtient satisfaction en 1770 et peut ainsi commencer des cours qu’il poursuit pratiquement sans interruption, quelles que soient les vicissitudes politiques, jusqu’à sa mort. Il gagne ainsi quel qu’argent supplémentaire qu’il investit dans l’édition d’ouvrages consacrés à sa discipline favorite. L’élément le plus notable est une « Botanographie Belgique » qui lui apporte une juste célébrité et la nomination de membre honoraire de la Société des Sciences.

Son fils, François-Joseph (1759-1815), suit exactement la même carrière, et succède tout naturellement à son père, qu’il avait secondé dans les dernières années de son existence. Comme lui, il enseigne, veille à l’entretien du jardin botanique, installé derrière l’ancien couvent des Récollets, édite ou réédite des ouvrages de botanique dont il rend compte à la Société des Sciences : il en est membre depuis 1803.

L’enseignement auquel il attache beaucoup de soins, se poursuit à partir de 1806 dans le cadre des Écoles académiques patronnées par la ville. Il y connaît un réel succès et un rapport, établi à son décès, cite « la façon distinguée dont il a exercé ses fonctions ».

Le décès de François-Joseph à 56 ans pose un délicat problème pour la poursuite de la charge d’enseignement. Son fils, Thémistocle, a tout juste dix-huit ans et commence ses études médicales à Paris. Il ne peut donc prendre dans l’immédiat la succession de son père à laquelle il est destiné. Un certain Stanislas Faille est nommé professeur intérimaire, mais ne peut entrer en fonction. En effet les collègues de François-Joseph Lestiboudois décident d’assurer l’enseignement de botanique à sa place, tout en abandonnant les émoluments correspondants à sa veuve et ce jusqu’à ce que Thémistocle puisse légalement prendre le poste de professeur : il est nommé par arrêté municipal du 8 avril 1819.

Thémistocle Lestiboudois (1797-1876) est certainement la personnalité la plus brillante de la dynastie. Extraordinairement actif il cumule les fonctions de professeur de botanique et de zoologie aux Écoles académiques avec des travaux de recherche qui lui mériteront d’être nommé membre de la Société des Sciences en 1821. Il publie de nombreuses notes dans les mémoires de la société, dont il assumera la présidence en 1832, 1838 et 1846.

Le troisième botaniste de la famille Lestiboudois ne limite pas son activité à l’étude des plantes : il exerce la médecine de façon fort active puisqu’il est nommé aux fonctions de médecin des pauvres, médecin des hôpitaux de Lille, membre du Conseil central de salubrité et membre du jury médical du département du Nord. Il joue, à ces divers titres, un rôle fort actif dans l’organisation des mesures d’hygiène arrêtées pour lutter contre l’épidémie de choléra de 1832 : il est rapporteur de la commission chargée par l’intendance sanitaire du département du Nord de dresser les listes des mesures à prendre pour lutter contre la redoutable maladie.

Il n’est pas étonnant, dans ces conditions, qu’il soit élu membre correspondant de l’Académie de Médecine en 1825. Son élection comme correspondant de l’Académie des Sciences est acquise en 1845.

Malgré ses multiples occupations Thémistocle Lestiboudois n’abandonne jamais complètement la botanique. Indépendamment de l’enseignement qui lui est confié, et sur lequel nous reviendrons, il est chargé en 1848 d’un cours d’anatomie et de physiologie végétales à la Faculté des Sciences de Paris. Il consacre les dernières années de sa vie à la rédaction d’un traité de l’anatomie végétale, que la mort l’empêche d’achever, mais qui est connu par plusieurs chapitres publiés en avant-première.

Enfin Thémistocle Lestiboudois s’investit dans une carrière politique qui comporte d’importantes responsabilités ; nous en indiquerons les principales étapes, sans les commenter : conseiller municipal et adjoint au maire de Lille en 1830, député en 1839, 1842 et 1846, conseiller général en 1843, maître des requêtes au Conseil d’État en 1852, conseiller d’État, à partir de 1855.

On pourrait se demander comment un seul homme a pu faire face à une telle variété de fonctions si on ne savait que plusieurs périodes doivent être distinguées dans la vie de leur responsable.

L’enseignement de la botanique à Lille, l’occupe pendant les deux premières décennies de sa vie active. Ses cours connaissent, comme ceux de ses prédécesseurs, une large audience. Un rapport du maire de Lille, adressé au préfet du Nord, le 24 juillet 1828 souligne que le cours de botanique constitue l’une des trois sections des Écoles Académiques de la ville. Il est fréquenté par soixante à soixante-dix élèves « dont le nombre décline un peu en fin de saison, parce que l’on aborde les difficultés les plus élevées... L’École a produit des botanistes très distingués tels Palissot de Beauvois et Du Petit Thouars ».

Il semble donc bien établi que Themistocle Lestiboudois ait très correctement rempli sa mission d’enseignant. Les cours qui lui sont confiés à Paris, par la suite, en apportent une autre preuve.

Mais on n’est pas surpris d’apprendre qu’à partir de 1835 l’aide d’un suppléant soit demandée, ce qui est accordé compte-tenu de la valeur du candidat proposé. Il s’agit du Dr Aimé Bailly (1797-1864) collègue du professeur en titre, en tant que médecin des hôpitaux et, comme lui, membre de la Société des Sciences dont il est président en 1831, 1835 et 1852.

Le remplacement de Lestiboudois, d’abord intermittent, devient permanent lorsque ses fonctions au Conseil d’État le retiennent dans la capitale de façon durable, soit deux ans avant la création à Lille de la Faculté des Sciences. L’enseignement de la botanique est dès lors assuré par le professeur d’histoire naturelle, Lacaze-Duthiers, lui-même rapidement coopté par la Société des Sciences.

Deux idées générales nous paraissent devoir être retenues de cet historique de l’enseignement de la botanique à Lille :

Le rôle de la famille Lestiboudois dans l’implantation des cours de cette discipline ; L’appui important apporté par la Société des Sciences à la réalisation d’un enseignement supérieur.

Cette idée est largement confirmée avec les deux autres personnalités que nous allons maintenant étudier.

Charles DELEZENNE et l'enseignement de la physique

Le personnage étonnant qu’est Charles Delezenne joue un rôle déterminant non seulement dans l’installation de l’enseignement de la physique à Lille, mais aussi, dans la création de cours de chimie.

Né le 4 octobre 1776 dans une famille tenant un petit commerce dans l’enceinte de la Vieille Bourse, à Lille, il marque, dès ses études classiques, effectuées au collège communal, un goût prononcé pour les mathématiques et la physique. Pour ces matières l’absence d’enseignant le contraint à être un autodidacte. Mis en apprentissage chez un horloger-bijoutier, il fait preuve d’une grande dextérité et apprend les rudiments d’un métier qui lui seront fort utiles pour fabriquer les instruments qu’il imaginera plus tard.

Cependant, son aptitude pour les sciences physiques l’aiguillonnant, il se rend, en 1800 à Paris pour se perfectionner. Il trouve des contacts intéressants et se fait remarquer par François Lacroix, l’un des meilleurs mathématiciens de son temps. Celui-ci lui procure un poste de professeur dans la très renommée et « sélect » institution » de Madame Campan. Delezenne s’y fait apprécier par les familles Beauharnais et Bonaparte. Trait caractéristique de sa personnalité, il refuse les propositions de poste de précepteur qui lui sont faites.

Revenu à Lille, en 1805, il se voit offrir la chaire de mathématiques de l’école secondaire communale, libérée par le décès accidentel de son titulaire Testelin. Les recommandations parisiennes l’ont aidé pour l’obtention de ce poste qu’il conserve jusqu’en 1836.

Immédiatement intéressé par la « Société des amateurs des Sciences et Arts » il sollicite son admission, offrant en hommage un « Traité de gnomonique élémentaire ». Admis en 1806 il multiplie les communications et publications dans les mémoires de la société. Il traite notamment de l’exacte altitude de la ville de Lille, de l’arithmétique, du fluide électrique, de l’utilité des paratonnerres (ce dernier travail à la suite d’un violent orage ayant éclaté le 11 juin 1810).

Cette même année 1810 voit une initiative importante que de Norguet rapporte ainsi : «Monsieur Delezenne demande l’autorisation de faire annoncer un cours public et gratuit d’électricité, de galvanomètrie et d’optique qu’il se propose de donner dans les salons de la Société (des Sciences). L’assemblée lui accorde l’objet de sa demande. Il apparaît donc très clairement que c’est sur l’initiative de la Société des Sciences que les cours publics de physique sont fondés.

L’organisation ainsi créée dure sans changement jusque 1817. Les salons où les cours se déroulent sont en fait une des salles du deuxième étage de l’ancien hôtel de ville, place Rihour, située à proximité du musée d’histoire naturelle. Cette année-là, le cours de physique devient cours communal, tout en restant dirigé par la Société des Sciences, par l’intermédiaire d’une commission spéciale. Delezenne reste bien entendu chargé de l’enseignement.

En 1822, la commission du cours de physique constate, la bonne tenue de ce cours et l’empressement des auditeurs ; 400 cartes ont été distribuées. Une première allocation départementale de 2000 francs, suivie d’une autre de 500 francs, prélevée sur le montant des amendes de police, a permis l’acquisition d’instruments importants.

Le rapport que le maire de Lille adresse en 1828 au préfet du Nord et que nous avons déjà signalé à propos du cours de botanique, s’intéresse également à l’enseignement de la physique. Le nombre de 400 élèves annoncé en 1822 est confirmé. Il est même précisé que 400 à 500 cartes d’auditeurs sont distribuées en début d’année mais que l’assiduité diminue au fil des mois. « Le cours finit habituellement avec une centaine de jeunes gens studieux. Beaucoup prennent des notes et demandent des explications supplémentaires. Plusieurs se procurent des instruments et montrent un goût très vif pour les sciences ». Bref, cet enseignement connaît un réel succès.

C’est sans doute ce qui conduit son promoteur à établir pour le maire de Lille un « projet d’établissement d’un cours de dessin linéaire et d’un cours de géométrie et de mécanique appliquée aux arts ». Il s’agit d’un plaidoyer en faveur de la création d’un enseignement pratique destiné aux enfants à partir de neuf ans et qui ont déjà reçu une instruction primaire suffisante.

Nous n’entrerons pas dans les détails de cette réalisation qui ne s’inscrit pas directement dans le cadre de ce travail plus spécialement consacré à l’enseignement supérieur. Nous pensons cependant bon de le signaler pour mieux situer l’ampleur des préoccupations didactiques de Charles Delezenne. Son projet est mis en œuvre par l’administration municipale et se trouve mentionné dans les rapports ultérieurement consacrés aux diverses activités placées sous la responsabilité de la Société des Sciences.

Le 20 novembre 1834, un nouveau rapport adressé par le maire de Lille au préfet du Nord, dans le cadre d’une enquête sur le fonctionnement des sociétés savantes, spécifie à propos de la Société des Sciences « que la surveillance du cabinet de physique lui est aussi confiée ; une somme de 2500 francs est allouée chaque année au budget municipal pour les frais du cours public et gratuit et le traitement du professeur.

Le cours de physique patronné conjointement par la municipalité et par la Société des Sciences de Lille est donc une institution stable et l’initiative de Charles Delezenne se trouve couronnée par le succès et la durée.

Il est sans doute nécessaire, pour mieux comprendre le personnage, d’évoquer la suite de sa carrière scientifique. Outre son professorat, Delezenne poursuit de façon tout à fait indépendante une série ininterrompue de recherches dont les résultats sont consignés dans les Mémoires de la Société des Sciences. Les points les plus importants font l’objet de notes adressées à l’Académie des Sciences.

Le nombre et la diversité de ces travaux, que la cessation des fonctions officielles de professeur en 1836 n’interrompent nullement, sont si grands que nous nous limiterons à la seule indication des grandes têtes de chapitre : acoustique musicale, optique, électromagnétisme, météorologie et mathématiques pures.

Une seule indication montre la variété des préoccupations de Charles Delezenne : la dernière communication qu’il présente à la tribune de la Société des Sciences, le 29 novembre 1861, est consacrée aux pigeons voyageurs !

Un point qui a beaucoup retenu l’attention des contemporains est sa très grande habileté manuelle, lui permettant de réaliser lui-même les appareils dont il a besoin ou qu’il invente. Un exemple nous semble pleinement significatif. Peu de temps après son retour à Lille, Delezenne fabrique deux piles sèches selon la technique du physicien Zamboni. Ces deux piles, alimentant un mécanisme de balancier frappant sur un timbre de sonnerie, sont déposées au Musée industriel dès son ouverture en 1856. Cette machine fonctionne de façon permanente, sans aucune intervention extérieure, dès 1815. Elle continue de la faire jusque 1870. Un simple nettoyage des axes du balancier permit la reprise du mouvement. On ne sait quand il prit fin.

L’ensemble des travaux de Delezenne voit sa valeur reconnue sur le plan national : en 1850 le célèbre chimiste Dumas, alors ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux publics, lui remet personnellement la Légion d’Honneur. La Société des Sciences est spécialement réunie pour cette manifestation. Cinq ans après, il est élu, au premier tour, membre correspondant de l’Académie des Sciences, section physique.

Le 12 septembre 1856 la Société des Sciences se rend au domicile de Charles Delezenne pour fêter le jubilé de son admission dans la compagnie. Le discours de félicitations est prononcé par le président, l’historien François Chon. Au total le jubilaire a présenté soixante communications imprimées dans les mémoires de la société.

En 1861 l’unanimité se fait sur son nom comme récipiendaire de la médaille d’or décernée par la section des sciences du Comité des Sociétés Savantes de France. La remise solennelle de cette distinction est faite à la Sorbonne.

Delezenne, malgré sa carrière presque uniquement locale, voit ses mérites reconnus sur le plan national à la fin de sa vie.

Depuis la mort, en 1862, de Jean-Baptiste Biot, l’un des conseillers de Pasteur, Charles Delezenne est le doyen des professeurs de physique en France.

Ses fonctions officielles à l’école de Lille cessent en 1836. Mais l’enseignement communal, sous l’égide de la Société des Sciences, est poursuivi jusqu’en 1848, à l’âge de 72 ans. S’il interrompt alors ses cours, pour des raisons de fatigue physique, Charles Delezenne conserve toute sa vigueur intellectuelle.

Benjamin Corenwinder (1820-1884) est nommé professeur suppléant en 1849 ; c’est un élève de Delezenne, mais surtout de Kuhlmann car son domaine est la chimie agronomique. Membre de la Société des Sciences (il en devient président en 1872) le nouveau professeur donne entière satisfaction. Il est néanmoins démis de ses fonctions dans des conditions souvent racontées de façon inexacte. C’est son refus de prêter serment à Napoléon III qui le fait considérer par le préfet comme démissionnaire d’office.

Une autre personnalité de valeur : Claude, Auguste Lamy (1820-1878), professeur au lycée de Lille, docteur es Sciences, lui succède. L’arrêté municipal de nomination précise que le nouveau titulaire entrera immédiatement en fonction (octobre 1852) et devra « se concerter avec Monsieur Delezenne, professeur honoraire, chargé de la direction et de la surveillance des cours ».

Ces dispositions prennent évidemment fin avec l’installation de la Faculté des Sciences en 1854.

Pour la physique, comme pour la botanique, on ne peut que constater avec satisfaction la valeur des responsables désignés pour assurer les cours organisés conjointement par la municipalité et la Société des Sciences. L’implication de cette dernière est nettement plus marquée pour la physique qu’elle ne l’était pour la botanique.

Frédéric KUHLMANN, Professeur de chimie

Il ne peut être question de donner une biographie complète du personnage prodigieusement actif qu’est Frédéric Kuhlmann (1803-1881). Nous nous centrerons surtout, sur son activité professorale et sur ses liens avec la Société des Sciences. Nous ne donnerons que de brèves indications dans les autres domaines.

En 1823, l’idée est avancée de compléter les cours de Charles Delezenne par un enseignement de « chimie appliquée aux arts ». Selon la terminologie alors adoptée, ce sont essentiellement les arts industriels et l’agronomie qui sont visés, les arts d’agrément viennent sensiblement plus loin dans les préoccupations des promoteurs de cette idée. Le professeur de physique se rend à Paris pour recruter un sujet susceptible de répondre aux exigences d’un tel emploi. Il entre en contact avec Nicolas Vauquelin, l’un des plus célèbres chimistes de l’époque, bien que tombé en discrédit en raison de ses opinions libérales. Celui-ci propose, pour le poste à pourvoir, un jeune Alsacien ayant déjà fait de solides études de chimie et qui travaille auprès de lui comme assistant. Il ne peut malheureusement pas lui procurer de situation décente ; l’offre lilloise tombe tout à fait à propos.

Kuhlmann, c’est de lui qu’il s’agit, accepte immédiatement le poste proposé et arrive à Lille dès la fin de l’année 1823. Toute une série de lettres adressées au préfet du Nord, le comte de Murat, permettent de se faire une idée du climat dans lequel s’effectue l’installation du jeune professeur. Celui-ci s’exprime avec la parfaite politesse qui convient envers l’administration qu’il sollicite : « ... l’intérêt que vous prenez à l’établissement du cours de chimie dont la direction m’est confiée, m’engage à prendre la liberté de vous faire une prière », écrit-il le 26 janvier 1824 en introduction à la demande de mise à disposition des instruments dont les pharmaciens membres du jury médical se servent une fois par an, lorsqu’ils font passer les examens d’aptitude à la profession pharmaceutique. Cette autorisation économiserait des frais d’achat d’appareils qui feraient double emploi : il s’agit donc d’un acte de gestionnaire économe.

Satisfaction lui est accordée, après consultation des intéressés. Usant de la même politesse diplomatique, Kuhlmann obtient une réponse favorable à plusieurs autres demandes : possibilité d’utiliser plusieurs pièces attenantes à l’amphithéâtre où il doit donner ses cours, et surtout octroi de quatre pièces pour son logement, situées dans le même bâtiment. Celui-ci est le « Lombard » qui est alors affecté, partie aux archives départementales en cours de classement, partie à diverses activités scientifiques.

Toujours dans la même série d’archives nous avons trouvé trace des frais de première installation du cours de chimie : achat de produits chimiques, d’échantillons minéralogiques, d’instruments de verre, d’un soufflet de forge, etc. Une pièce comptable de mars 1824 établit le total à 1693,10 F dont 32,60 de transport, tout ceci devant venir de Paris, faute de fournisseur installé à Lille.

Enfin toutes les dispositions matérielles étant arrêtées, il peut être procédé à l’annonce de l’ouverture des cours. Le 4 juin 1824, M. Bonnier de Layens, adjoint, accuse réception, au nom du maire de Lille (le comte de Muyssart), de la lettre par laquelle le professeur précise « qu’il se propose de faire le premier cours samedi prochain (soit le 26) à midi ». L’adjoint ajoute que le maire a prescrit d’informer les administrés par affiches et par journaux et a incité le Conseil municipal à assister à cette ouverture.

Cette lettre contient deux renseignements significatifs. En premier lieu, l’annonce de cours scientifiques, auxquels le grand public est convié d’assister, le samedi à midi, parait tout à fait surprenante de nos jours. En fait il ne s’agit nullement d’une fantaisie de Kuhlmann qui a certainement fixé date et horaire en accord avec les autorités municipales. Cette façon de donner des cours d’enseignement supérieur le samedi à midi, ou dans l’après-midi, convenait aux habitudes sociales de cette époque et va se poursuivre pendant plusieurs décennies, même après l’ouverture de la Faculté des Sciences.

Le deuxième point sur lequel nous voulons attirer l’attention est la signification sociale de l’événement : le Conseil municipal et la bourgeoisie de Lille sont invités à cette leçon inaugurale comme ils le seraient de nos jours à la présentation d’une exposition de première importance. Ces cours de chimie ne sont pas seulement destinés à une jeunesse studieuse ou à des industriels souhaitant améliorer leurs procédés de fabrication ; ils s’adressent aussi à toute la partie de la population désireuse de participer à la connaissance d’un mouvement scientifique en plein développement.

L’espoir des organisateurs ne devait pas être déçu. Le rapport envoyé par le maire de Lille au préfet du Nord, le 24 juillet 1828, mentionne avec autant de louanges et d’enthousiasme les cours de chimie que ceux de physique et de botanique. Le nombre d’assistants s’élève à deux cents et ne cesse de croître. L’utilité du cours est démontrée par la formation de nombreux établissements industriels dans la ville et les environs. « ... des fabricants ont mis en pratique les connaissances qu’ils ont puisées clans les leçons du professeur. En effet, depuis la création du cours il a été établi une fabrique de céruse à Wazemmes, un autre faubourg de Béthune ; une fabrique de colle forte à Marcq ; une fabrique de gélatine d’os à Fives, à Wazemmes ; une teinturerie en rouge d’Andrinople et autres couleurs solides ; une fabrique d’acide sulfurique ardemment désirée par le commerce de Lille ; une fabrique de soude française. Enfin une autre branche prendra bientôt de grands développements, c’est la fabrication du sucre de betteraves. Les propriétaires des anciennes fabriques trouvent aussi de grands avantages dans les leçons du professeur pour l’exercice de leur industrie ».

Ces extraits de rapport municipal montrent que les buts souhaités en créant un enseignement de « la chimie appliquée aux arts » sont pleinement atteints. Non seulement Kuhlmann donne d’excellentes idées à ses auditeurs, mais il les met lui-même en application : les usines d’acide sulfurique et de soude signalées dans ce texte sont les premières créations industrielles du chimiste. Nous reviendrons sur ce point, après avoir évoqué le rôle d’appui apporté par la Société des Sciences à cette branche de l’enseignement supérieur organisé à Lille.

Pour bien affirmer son soutien, la société nomme le jeune professeur membre titulaire, très peu de temps après son arrivée à Lille, le 19 mars 1824. Il est le seul membre admis cette année-là. Il fait immédiatement paraître des travaux originaux. On trouve deux articles sous sa signature dans le volume 7 de la I° série des Mémoires (1823-1824), l’un consacré aux eaux de lessivage, l’autre à un quinquina propre à être utilisée pour la teinture.

Kuhlmann reste très attaché à la Société des Sciences. Lorsqu’en 1878, à l’occasion d’une manifestation d’hommage à leur ancien président, la Société des Sciences, la Société Industrielle et la Chambre de Commerce lui offrent entre autres présents, un livre rassemblant les deux-cent soixante articles scientifiques parus sous sa signature, il apparaît que les deux tiers d’entre eux ont été publiés dans les Mémoires de la société.

Trois fois vice-président (1839, 1858 et 1872), quatre fois président (1836, 1840, 1859, 1873). Frédéric Kuhlmann demande à être dispensé, en raison de son âge, de la cinquième présidence que la Société des Sciences lui propose en 1876.

À son décès en 1881, il lègue à la Société une somme de 50000 francs dont les arrérages sont destinés à former deux prix annuels récompensant des découvertes ou des travaux concernant l’avancement des Sciences. Les vicissitudes éprouvées par les sociétés savantes et les aléas des placements en fonds d’État ont supprimé la possibilité de poursuivre les clauses financières de ce legs, mais le prix Kuhlmann reste une des récompenses ayant le plus de prestige parmi celles décernées chaque année.

Les liens unissant Frédéric Kuhlmann à la Société des Sciences de Lille constituent un indice précis de l’autorité scientifique persistante de celui qui était arrivé dans notre ville pour assurer une fonction professorale. Celle-ci est constamment complétée par l’activité de chercheur qui est reconnue sur le plan national par son élection à l’Académie de Sciences, d’abord comme membre correspondant (1847), puis comme titulaire.

Les contacts liés avec les industriels du Nord de la France font rapidement comprendre à l’enseignant combien il est dommageable pour la prospérité de la région d’être privée de la fabrication des produits chimiques dont le rôle indispensable s’avère chaque jour plus évident. Il oriente son activité dans une nouvelle voie : l’industrie. En 1826 il crée à Loos une fabrique de produits chimiques, à l’aide de capitaux familiaux. Il en devient le seul gérant après le décès, en 1853, de son beau-frère Descat.

Le succès d’entreprises dont il ne cesse de moderniser les procédés de fabrication, grâce aux recherches de son laboratoire, le conduit à implanter de nouvelles usines avec l’aide de son fils et de ses trois gendres. Les décès imprévus de son fils et de deux de ses gendres le privent d’une aide précieuse, mais ne brisent pas la croissance du groupe chimique.

Bientôt, il apparaît que pour mener sa tâche d’industriel il est nécessaire de compléter ses responsabilités par celles d’administrateur. Après avoir été directeur de la Monnaie de Lille (1853-1857), il lance, avec quelques autres chefs d’entreprises, l’idée de la Société Industrielle du Nord dont il est le premier président en 1873, et apporte son appui à la Chambre de commerce de Lille dont il assure, durant de nombreuses années, la présidence (1848 à 1869).

Conseiller général du Nord, administrateur du Comptoir National d’Escompte et du Crédit du Nord, il participe à l’implantation des chemins de fer dans notre région et combat pour l’extension des liaisons par canaux.

Nous limitons là l’exposé, incomplet, de ses fonctions officielles et privées et n’aborderons pas l’importante liste des récompenses internationales, nationales et locales ayant couronné sa recherche et son activité. On peut penser que, malgré son énergie, il n’a pas eu trop de regrets d’abandonner son professorat en 1854, lors de la création à Lille de la Faculté des Sciences, la multiplicité de ses fonctions ne lui laissant plus qu’un temps fort réduit pour la préparation de ses cours.

De fait les liaisons entre Frédéric Kuhlmann et Louis Pasteur se sont avérées tout à fait cordiales et c’est à cet aspect des choses que nous désirons consacrer les derniers passages de ce travail.

Les relations entre la Faculté des Sciences et la Société des Sciences de Lille

Les conditions matérielles et psychologiques de l’arrivée de Louis Pasteur comme premier doyen de la Faculté des Sciences créée à Lille en 1854, sont bien connues et il n’est nécessaire d’en reprendre l’exposé. Le nouveau doyen et les trois professeurs l’entourant furent fort bien accueillis par la Société des Sciences qui n’a manifesté aucun ressentiment d’avoir été privée, au profit de la jeune faculté, des nouveaux locaux prévus initialement à son intention dans le bâtiment rattaché au Lycée et abritant l’École préparatoire de médecine.

De même, l’abandon des collections du Musée d’histoire naturelle, né en 1822 à l’initiative de la Société des Sciences, au profit de la nouvelle faculté, se fit sans aucune difficulté. Le professeur de Sciences naturelles devient le conservateur de ce musée et, l’habitude étant alors de confier la gestion de chaque musée à une commission spécialisée, il est simplement prévu que le président et un membre de la Société des Sciences feront de droit partie de cette commission.

L’intégration du corps professoral au sein de la Société ne pose aucun problème. Nous avons déjà évoqué la personnalité de Claude Henry Lamy, admis en avril 1847, et qui est élu président en 1857 et 1862. Le 2 mars 1855 le doyen Louis Pasteur et deux autres professeurs, Henri Lacaze-Duthiers (Histoire Naturelle) et Gabriel Mahistre (Mathématiques), sont cooptés. Pasteur est nommé président en 1857, mais ne le reste pas longtemps en raison de son départ précipité pour Paris. Nous verrons plus loin qu’il a conservé un fidèle attachement à la Société des Sciences.

En 1860, les départs de Lacaze-Duthiers et de Mahistre sont enregistrés. Le premier, appelé à d’autres fonctions hors de Lille, demande à conserver le titre de membre correspondant. Le second décède prématurément. La disparition d’un enseignant, encore jeune, plonge sa famille dans une situation financière dramatique, le système des retraites et assurances étant alors totalement défaillant. Le cas de Mahistre est un de ceux qui conduisent Pasteur à s’impliquer très à fond dans la Société des Amis des Sciences, fondée en 1857 par le baron Thenard, et destinée à venir au secours des scientifiques et de leur famille dans la détresse financière.

Il convient de s’attarder sur la personnalité de Louis Pasteur dans ses relations avec la Société des Sciences de Lille.

La première manifestation publique a lieu le 20 novembre 1855 au cours de la séance solennelle de rentrée des facultés, consacrée en même temps à l’inauguration officielle de la Faculté des Sciences de Lille. Pasteur, chargé du discours inaugural n’oublie pas les remerciements dus à ses prédécesseurs : « Avant de terminer, Messieurs, la Faculté des Sciences a une dette de reconnaissance à acquitter. Je vous parlais tout à l’heure de son auditoire nombreux et sympathique qui avait accueilli ses premiers pas. Elle le doit à son zèle, au dévouement dont elle a fait preuve. Mais la plus grande part revient aux hommes éminents qui, dans cette ville, ont préparé les voies de l’enseignement supérieur. La plus grande part revient aux savants professeurs de vos cours municipaux. Je vous entends nommer avec moi MM. Delezenne, Kuhlmann, Lestiboudois ».

Plus loin l’orateur vante les mérites de « la Société Impériale des Sciences qui a su réunir tant d’hommes qualifiés, de membres de l’Institut responsables d’un enseignement public ».

Mais la marque de reconnaissance la plus forte témoignée par le Doyen de Faculté envers la Société des Sciences de Lille est le privilège qu’il lui a consenti en lui accordant la primeur de sa célèbre communication Mémoire sur la fermentation appelée lactique qui contient en germe tout le développement de la microbiologie. En effet ce texte est lu à la tribune de la Société le 3 août 1857, avant d’être présenté à l’Académie des Sciences. Il s’agit là d’un geste tout à fait significatif de la part d’un auteur pleinement conscient de la valeur du travail qu’il présente.

Les marques de reconnaissance ne cessent pas avec l’éloignement de Pasteur de Lille. Le 4 avril 1873 la Société, sous la présidence de Frédéric Kuhlmann, décide que celui-ci « écrira à Monsieur Pasteur pour le féliciter de la double distinction qu’il vient d’obtenir de la Société d’encouragement et de l’Académie de Médecine ». Effectivement l’ancien doyen a été élu par cette compagnie, dans la section des membres libres.

En témoignage de ses sentiments, Pasteur adresse à Kuhlmann une lettre exceptionnellement chaleureuse, datée du 24 avril :

« ... La Ville de Lille, sa Faculté, sa Société des Sciences, qui est au premier rang des sociétés scientifiques de province, marqueront toujours dans mes plus chers souvenirs, car c’est à Lille, en visitant les distilleries de votre riche département que j’ai été entraîné en 1854, par les critiques de mon enseignement, à la Faculté, à me livrer tout entier à l’étude des mystérieux phénomènes de la fermentation, base principale de plusieurs grandes industries du Nord de la France ».

« Il m’est bien agréable de penser que le témoignage que je reçois de mes chers collègues, m’est adressé par un maître aimé et par un ami qui compte parmi les premiers représentants de la France scientifique et industrielle et qui m’a accueilli autrefois à Lille avec une bonté toute personnelle... ».

Cette lettre, malheureusement détruite, comme tant d’autres documents, dans l’incendie de la mairie de Lille en 1916, témoigne que, vingt ans après, Pasteur conservait intact le souvenir de l’origine lilloise de ses découvertes et de l’appui apporté par la Société des Sciences.

Réciproquement celle-ci, bien loin d’exprimer de l’amertume à l’installation de la Faculté, témoigne hautement sa satisfaction. C’est ce qu’exprime fort bien son président, François Chon, lors de la séance solennelle du 28 décembre 1869 : « La Société Impériale (des Sciences) s’est réjouie l’une des premières, d’une création qui comblait ses vœux plusieurs fois exprimés, qui lui amenait des renforts qui allaient remplir avec honneur ses vides. Les trois doyens qui se sont succédé à la tête de notre enseignement supérieur, ont aussi dirigé nos réunions en qualité de présidents et ils ont laissé à notre compagnie un reflet de leur célébrité comme de leur savoir ».

Après avoir rappelé les noms des doyens et des professeurs de la Faculté des Sciences membres de la Société et leur avoir consacré quelques mots d’éloge, Chon conclut : « Ainsi la Faculté des Sciences et la Société des Sciences se sont prêté un appui réciproque ; l’une et l’autre ont contribué... à propager le goût des études qu’on déclarait volontiers étrangères à des populations en apparence exclusivement vouées à l’industrie ».

Effectivement, comme le rappelle Chon, les liens demeurent étroits entre la Société des Sciences et la Faculté. Le recrutement de la société s’étend également aux professeurs de l’École préparatoire de Médecine et de l’Hôpital militaire. Lorsque Lille est dotée d’autres établissements universitaires, soit par création (1876), soit par transfert depuis Douai (1887), la Société trouve dans le personnel enseignant de ces divers établissements de nouvelles richesses humaines.

Elle ne leur offre pas seulement un lieu de rencontres interdisciplinaires mais des possibilités de publications très appréciées à une époque où le développement des revues spécialisées s’amorce lentement.

Une autre occasion de rencontre de la Société et des établissements d’enseignement supérieur est représentée par la distribution annuelle des prix et médailles, destinée tant à encourager les talents de jeunes chercheurs qu’à récompenser des œuvres confirmées.

Ainsi la Société des Sciences, de l’Agriculture et des Arts — donnons-lui son titre complet au moment de clore cette communication — après avoir tracé les voies favorisant l’installation de l’enseignement supérieur à Lille, a collaboré avec les diverses facultés en vue de faciliter leur tâche de diffusion des connaissances et d’encourager leurs efforts.

Dr. Alain Gerard

  • ancien Interne des Hôpitaux est membre de la SSAAL depuis 1991
  • archiviste de la SSAAL de 1991 à 2009
  • Président SSAAL  1996 à 1997
  • En 1957 il reçoit le Prix Pingrenon science
  • en 1987 la Médaille Wicar et Hagelstein lettres

Ce texte est tiré de:

Gérard, A. (2000) La Société des Sciences de 1802 à 1854. In R. Vandenbussche (éd.), Cent ans d’université lilloise. Publications de l’Institut de recherches historiques du Septentrion.

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